Tout d’abord notre conférencier a posé une 1ère question : les cathares ont-ils vraiment existé ?
1/ Le terme cathare (qui vient du grec et veut dire « pur ») a été utilisé tardivement pour définir des hérétiques. Les « cathares » s’appelaient entre eux bons-hommes ou bonnes-femmes.
2/ Les sources -très nombreuses- ne viennent que de leurs ennemis, c’est-à-dire l’église catholique et l’inquisition. Jusqu’à quel point le phénomène cathare n’est-il pas une création de l’église ?
Le point de départ au catharisme est la réforme grégorienne :
Le pape Grégoire (1073 – 1085) voulait purifier l’église et assurer la prédominance du Vatican sur l’ensemble du monde. En réaction à cette mise au pas par l’église, beaucoup se sont secrètement indignés.
A titre d’exemple, le mariage devient un sacrement officiel et indissoluble après le 11ème siècle. Auparavant n’importe quel notable officialisait un mariage que l’on pouvait dénoncer à tout moment, ce qui pouvait arranger la petite noblesse de province. Les évêques sont maintenant nommés par le Vatican, ce qui irrite cette même noblesse : elle perd la place dévolue habituellement au fils cadet et surtout la ressource de la dîme.
Autre exemple le célibat des prêtres s’impose à cette époque. Il s’agit de montrer que les gens d’église sont des êtres spéciaux. Enfin, la transsubstantiation (changement de l’hostie en corps du Christ par la volonté du prêtre) est révélée à cette époque. C’est un acte quasi magique qui renforce le crédit de l’église.
Pour encore mieux marquer son pouvoir temporel, le pape lance des guerres, comme un roi, mais ce sont des guerres justes.
Face à ces dérives autoritaires, les bons-hommes prônent un retour aux textes (cf les protestants): ils sont pauvres, ils n’ont pas d’église, ils lisent et commentent une bible (limitée au nouveau testament) en langue d’Oc. Ils pratiquent la pureté sexuelle, ce qui à terme devait nécessairement conduire à leur disparition.
Les 1ers convertis sont donc les petits nobles, puis les marchands contre lesquels l’église lance la haine de l’argent.
Les faits :
Innocent III oblige le comte de Toulouse à sévir contre les hérétiques en son fief. Devant les faibles résultats obtenus, le pape lance en 1208, une croisade contre les Albigeois qui sont « pires que les sarrazins ». C’est Simon de Montfort qui dirige cette croisade. Il revient de la 4ème croisade (1204) qui s’était soldée par la prise de Constantinople (bien loin de l’objectif initial). Autrement dit c’est un redoutable guerrier. En 1213, le comte de Toulouse est battu. Son fils prend la relève. En 12226, les Montfort appellent en renfort le roi de France qui prend ainsi pied dans le midi.
En 1231, l’inquisition est créée pour lutter contre toutes formes d’hérésie. Elle est dirigée par les Dominicains (« Domini canes » = chiens de Dieu).
En 1244 Montségur, un des derniers réduits cathares, est détruit.
Les cathares aujourd’hui :
La révolution française tolère toutes les religions. Au cours des décennies suivantes le protestantisme se développe. Pour beaucoup cela reste une religion hérétique.
La III ème république voit l’avènement au pouvoir de gens du midi, souvent protestants. Se développe alors un anti-catharisme d’extrême droite : les cathares sont des socialistes dangereux si ce n’est des juifs. L’affaire Dreyfus explose à cette époque (1894 – 1906).
A gauche, on les voit comme des libres penseurs en avance sur leur temps.
En 1905 c’est la séparation de l’église et de l’état.
Jusqu’au milieu des années 30, la France est majoritairement un pays rural. En 1960, force est de constater que la ville a triomphé. Cela se traduit par une nostalgie de la ruralité :

D’abord des études sociologiques montrent ce changement profond de la société française. « La fin des paysans » de Mendras en 1967 en est un exemple remarquable. A la même période, Jean Ferrat -interdit de télévision et radio, car communiste- chante « que la montagne est belle ». En 1971 c’est la lutte du Larzac contre l’extension d’un camp militaire qui durera 10 ans (jusqu’à l’abandon du projet par Mitterrand, nouvellement élu). Le livre « Montaillou » de Leroy Ladurie édité en 1975 devient un grand succès de librairie comme « le cheval d’orgueil » de Pierre-Jakez Hélias (sur la bretagne) paru en 1975 également. Enfin « La caméra explore le temps » fait découvrir le drame cathare aux millions de spectateurs qui vont voir l’émission à la télévision. Enfin, n’oublions pas qu’en 1981, Mitterrand est élu avec une affiche le présentant avec un arrière-plan de village idéal (sans croix sur le clocher toutefois)
Le cathare devient l’homme proche de la nature et plus encore le révolutionnaire. C’est une image idéalisée.
En 1991 la marque « cathare » est déposée. Le consumérisme triomphe à l’opposé des idées véhiculées par les « bons-hommes ».
En savoir plus :
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Collectif, « Cathares. Toulouse dans la croisade », Musée Saint-Raymond, Toulouse / Couvent des Jacobins, Toulouse / In Fine éditions d’art, 2024.
Jean-Louis Biget, « Hérésie et inquisition dans le midi de la France », Picard, 2007.
William Blanc, « La revanche des cathares, réhabilités par la gauche », Retronews, septembre 2022 [disponible en ligne].
Marie-Carmen Garcia, William Genieys, « L’Invention du Pays Cathare. Essai sur la constitution d’un territoire imaginé », L’Harmattan, 2005.
« Historiographie du catharisme », Cahiers de Fanjeaux, n°14, 1979 [disponible en ligne].
A écouter: Francis Cabrel : Les chevaliers cathares