Série « les femmes oubliées »

« La première fois qu’on m’a parlé d’une compositrice, j’ai eu la même réaction que tous les acteurs de la musique classique « s’il y en avait, je les connaîtrais » ».

Voilà ce qu’écrit Debora Waldman, aujourd’hui cheffe d’orchestre de l’opéra national d’Avignon Provence, dans « la symphonie oubliée * ».

Des femmes compositrices, il y en a eu, certaines sont connues, mais beaucoup sont devenues silencieuses avec le temps.
C’est le cas de Charlotte Sohy que Debora Waldman découvre en mars 2013.

Elle rencontre par hasard François-Henry Labey, le petit-fils de Charlotte. Il lui parle de sa grand-mère et lui confie ses archives : une quarantaine de pièces dont une symphonie. Une symphonie : cet exercice si difficile !

Debora les étudiera et sera impressionnée par la qualité des compositions de Charlotte, qu’elle signera souvent Ch.Sohy, en raison des préjugés misogynes de l’époque.

Charlotte naît à Paris dans une famille bourgeoise. Enfant précoce, ses parents l’encouragent dans les études et notamment dans celle de la musique, qui dès son plus jeune âge la passionne. C’est décidé, elle sera chef d’orchestre ! La réponse de sa mère « ce n’est pas un métier de femme » ne la décourage pas, elle poursuit ses études musicales avec brio.

Elle étudie l’orgue à la Schola Cantorum et son jeu séduit un jeune professeur de la classe d’orchestre, Marcel Labey. Il a 32 ans, elle 20 mais ce sera un coup de foudre partagé. Ils se marieront très rapidement et ne ne se quitteront plus. Ils sont unis par leur passion de la musique et se soutiennent dans leur travail.

Charlotte écrit le livret de l’opéra de Marcel et celui-ci qui a conscience du génie de sa femme, l’encourage à composer.

La première guerre mondiale éclate. Marcel est mobilisé et sera grièvement blessé en 1915. Il survivra à sa blessure. Charlotte est seule pour s’occuper de leur maison et de leurs quatre enfants (ils en auront sept). Elle prend néanmoins le temps de se rendre sur le front pour s’occuper de son mari blessé et faire en sorte que sa convalescence se passe dans leur demeure, en famille.

C’est dans cette période angoissante et difficile qu’elle écrit « la symphonie grande guerre ». Elle ne sera jamais jouée de son vivant et tombera dans l’oubli jusqu’à ce jour de 2019 où elle naîtra à Besançon sous la baguette de Debora Waldman.

Au soir de cette représentation Debora Wladman dira « cette musique est faite pour l’éternité, non pas celle des cimetières et des archives muettes, mais celle des livres d’histoire et des salles de concert du monde entier ».

* La symphonie oubliée, Debora Waldman, Pauline Sommelet, Editions Robert Laffont, 2021

Liens internet :

https://www.francemusique.fr/emissions/musicopolis/charlotte-sohy-une-symphoniste-oubliee