2021 : un goûter d’anniversaire. Les téléphones se transforment en appareil photo et voilà des dizaines d’images enregistrées sur une minuscule carte mémoire.

1826 : naissance de la photographie. Il faut plusieurs heures de pose pour impressionner les plaques d’alors. On ne parle pas d’instantanés !

Photographier signifie littéralement écrire avec la lumière ! Alors, que va-t-on écrire avec cette nouvelle technique ?

Les premiers clichés sont des portraits. Tout d’abord destinés aux gens fortunés, se faire photographier leur permet de montrer leur position sociale. Les vêtements choisis avec soin, la posture droite et fière, le décor, autant d’éléments qui témoignent de leur importance dans la société.

Au 19ème siècle, la photographie se fait en intérieur. La fée électricité n’équipe pas encore les maisons et pour impressionner les plaques, il faut de la lumière, beaucoup de lumière, apportée par les grandes façades en verre des studios de l’époque.

1860, « chez Nadar », le grand photographe à la mode, se bousculent les auteurs célèbres. Baudelaire, sur un fond flouté, le regard vague, donne l’image du poète, Emile Zola, à sa table de travail, lunettes sur le nez, entouré de livres suggère l’intellectuel.

Après Félix, le père, le studio sera repris par Paul, son fils qui ouvrira ses portes aux artistes : danseurs, comédiens. Se développe alors tout l’art de la retouche, il s’agit de gommer les aspérités de la peau, d’éliminer jusqu’à la moindre ride.

A la fin du 19ème siècle, la photo s’ouvre à la bourgeoisie. Le « portrait-carte de visite » est né. On la dépose lors des visites aux domiciles des connaissances.

Avec la Commune de Paris, Alphonse Bertillon crée le premier registre policier. Les délinquants y sont fichés : leurs mesures, tailles y sont inscrites et leurs caractéristiques physiques photographiées.

Les ouvriers qui émigrent de Pologne pour travailler dans les mines du nord de la France se voient attribuer une carte d’identité avec leur photographie. (La carte d’identité ne sera rendue obligatoire en France qu’en 1940, sous le régime de Vichy).

En 1920, Kasimir Zgorecki, photographe d’origine polonaise s’intéresse à la classe ouvrière. Les fonds peints interchangeables, plusieurs photos sur un même cliché que l’on peut couper rendent la photographie plus économique.

A cette époque, la coutume se répand de photographier les enfants morts en bas âge.

Ainsi, à travers ces portraits s’écrivent de minuscules scènes de vie.

C’est au début du 20ème siècle que la photo et le document vont se marier. Saisir pour immortaliser tout ce qui va disparaître, c’est dans cette aventure que se lance Eugène Atget.

Ainsi, grâce à son travail, des heurtoirs de porte aux métiers d’antan (le vendeur d’abat-jours, les chiffonniers, la marchande de lacets, le marchand de papier à lettres), nous connaissons un peu du quotidien de nos ancêtres. 

Après la deuxième guerre mondiale, même si de grands studios professionnels continuent de sublimer l’image des stars et des personnages importants, comme le studio Harcourt, la photo se démocratise. Le 20ème siècle, siècle de la technologie, voit l’arrivée des appareils photos et de la pellicule. Ils supplanteront progressivement la chambre photographique.

Les temps de pose se comptent en milliseconde, la photo saisit le mouvement, la couleur grignote petit à petit le noir et blanc, des centaines de moments heureux peuplent les albums de photos de famille.

Et alors, reste-il encore à inventer ?

La photo, témoin d’une époque, s’use. Les supports se désintègrent, les couleurs s’estompent. Le projet « Anonymous », créé en Angleterre, se veut un terrain d’exploration : numériser les images d’antan pour éviter que tous les souvenirs qu’elles véhiculent ne disparaissent.

Cécile Tourneur, conférencière-formatrice au Jeu de Paume de Paris a animé pour l’ALCAD une webconférence le 11 mai dernier intitulée « Le portrait photographique ».

Depuis 2004, le musée du Jeu de Paume est Centre d’art et lieu de référence pour la diffusion de l’image des XXe siècle et XXIe siècle.

Il a vocation à produire ou coproduire des expositions, mais aussi des cycles de cinéma, colloques, séminaires, activités éducatives ou encore des publications.